
Vendredi, journée d’exception. Éva et Jean m’ont à nouveau invité à une ballade en voiture sur les routes du Québec. Sauf que ce vendredi était jour d’anniversaire de mon amie Éva. Qui vieillit si bien en beauté

Ce sera la seule petite indiscrétion que je vous livrerai sur cette amie. Il faut savoir protéger les amitiés qui ne souffrent pas d’être trop exposées à la lumière

Journée exceptionnelle marquée par un ensoleillement exceptionnel. Mais quel soleil en ce vendredi d’automne qui avance en âge…

Chaque seconde de cette randonnée se métamorphosait en autant de tableaux que j’avais grand mal à saisir dans leur déploiement

En parcourant ces grandes routes où nous nous abandonnons à leur totale inspiration, nous expérimentons ce constat qu’énonçait cet agriculteur, philosophe et essayiste français d’origine algérienne, Pierre Rabhi, selon lequel la sobriété permet de retrouver la vibration de l’enchantement.

Au déploiement des tableaux de la nature automnale s’ajoutait la profondeur de nos discussions, de nos échanges, de nos expériences respectives. Des dialogues abondants d’un grand enrichissement

Le grand anthropologue et mythologue Joseph Campbel, né aux États-Unis en 1904 et décédé en 1987, se disait inspiré par un personnage, Babbitt, issu de la nouvelle éponyme de Sinclair Lewis. Et dans la dernière page de cette nouvelle, nous pouvons lire : Ne soyez pas effrayé par votre famille. Non, ni par les habitants du Zénith. Ni par vous -même, comme je l’ai été. Avancez , vieil homme! Le monde est à vous!

Repas partagé du midi. Je dirais presque repas chez l’artisan. Quelques tables, des solitaires locaux se livrant à l’oisiveté devant une tasse de café. Un accueil bienveillant, simple, et un peu vieillot. Il y avait en cet endroit la surprise de revenir aux choses simples, sans grand apparat.

Ce fut une journée de simplicité volontaire. Que peut-on rechercher de mieux lorsque l’âge fait sentir son poids sur nos corps et nos esprits? Ne serait-ce là qu’une vision toute judéo-chrétienne de la vie?

Chez l’habitant, sont-ce les heures qui l’habitent ou habite-t-il lui-même chacune de ces heures qui enrichissent la Terre?

Notre journée a ressemblé à cette route qui ne fuit pas mais qui déploie, pour notre plus grand plaisir, ses variations sur le thème de la vie

Ces promenades accompagnées sont une source de médication naturelle au mal de vivre et aux angoisses de l’avenir qu’on sait de plus en plus proche d’une fin. Et Kant saura toujours nous nous ramener à la réalité en telles occasions : le bonheur est un idéal de l’imagination et non de la raison.

En ce vendredi il a fait si beau. En ce vendredi la promenade fut si enrichissante. Et ce vendredi aura été marqué par un bel anniversaire de naissance. Le bonheur, quel qu’il soit, apporte air, lumière et liberté de mouvement (Nietsche)